Toutes les deux semaines, j’invite une personne sur le blog qui te parlera de ses jeux préférés pour travailler ! Tu pourras ainsi découvrir l’univers de 10 invité·es aux profils variés mais qui utilisent des jeux dans leur métier. Voici de quoi t’inspirer et faire connaissance avec des professionnel·les passionant·es et passioné·es !!! Dans ce premier numéro, je laisse la parole à Stéphane Delbecque !

1/ Peux-tu te présenter en quelques mots et expliquer pourquoi il est bénéfique d’utiliser les jeux en entreprise ?

Bonjour, je m’appelle Stéphane Delbecque et après 23 ans d’informatique et 10 ans de formation, je viens récemment de créer une entreprise qui propose des ateliers ludiques pour développer les compétences managériales de toutes les personnes qui doivent animer une équipe.

Pendant tout mon parcours professionnel, j’ai longtemps été fasciné par ce qui faisait bouger les personnes sans toujours y mettre des explications. Il a fallu que je m’intéresse à la personnalité humaine et à son fonctionnement pour avoir des éléments de réponse.

C’est comme cela que je me suis naturellement tourné vers le le jeu qui permet d’activer la plupart des leviers de motivation qui mettent les gens en mouvement.

Et puis, finalement l’entreprise, qu’elle soit privée ou publique, n’est-elle pas un jeu grandeur nature ? Elle a des règles, un classement (hiérarchique), on y gagne des primes, des bonus ou des points (d’indice)…

C’est un jeu souvent compétitif mais qui peut aussi être coopératif.

Il faut juste garder en tête que nous ne sommes pas les pions mais que c’est bien nous qui jouons!

2/ Quel est selon toi le jeu très simple d’utilisation en entreprise mais diablement efficace ?

Le quiz.

Poser une question fermée (ou mieux encore une question ouverte) pour solliciter une réflexion est encore le meilleur moyen de faire bouger son interlocuteur, que ce soit en entretien, en négociation ou en formation…

…voire même pour présenter un projet en CoDir : au lieu du traditionnel “Bonjour, je vous ai préparé une ‘petite’ présentation”, attaquer bille en tête par une question: “mettez-vous par deux, prenez une feuille de papier et donnez-moi la définition de… (ou les 3 principaux avantages de…)”. Il faut oser mais je peux l’assurer pour l’avoir pratiqué: c’est particulièrement efficace.

Le questionnement est réellement un outil puissant.

Comme disent les allemands “Wer fragt, der führt”, celui qui questionne dirige. On l’oublie trop souvent.

Prenons un autre exemple: la fameuse conduite du changement ; quand il faut convaincre les équipes, on a toujours tendance à argumenter sur le “sens” (l’intérêt de changer de logiciel, de faire cette réorganisation, etc.), montrer tous les bénéfices et surtout atténuer les contraintes.

Mais le meilleur moyen de permettre aux équipes de s’approprier un changement n’est-il pas de leur poser quelques questions ?

Par exemple : qu’est-ce qui vous plaît ou vous motive dans ce changement? Qu’est-ce qui vous inquiète ou vous ennuie? Qu’est-ce qui vous pose question?

Les managers peuvent avoir peur de poser ce type de questions car ils ou elles ne savent pas toujours comment réagir aux émotions ou aux questions qui pourraient être soulevées (pourquoi croire d’ailleurs qu’une réponse est forcément nécessaire?) mais c’est un exercice salutaire que je conseille car il rend chacun·e responsable de sa propre mise en mouvement.

Et s’il fallait parler d’un jeu de quiz en particulier,  je citerais volontiers Plickers qui est un jeu de quiz de type QCM :  chaque question est projetée depuis l’écran de l’ordinateur, les participant·es lèvent un QR Code en l’orientant en fonction de leur réponse et la personne qui anime prend les QR Code en photo avec son téléphone et les résultats apparaissent à l’écran.

Si cette application demande bien sûr une connexion internet, elle ne nécessite pas que les participant·es disposent d’un téléphone. Et elle a toujours un petit effet de surprise parmi les personnes qui connaissent déjà d’autres applications comme Kahoot ou Klaxoon.

3/ Quel est le jeu qui t’a fait gagner beaucoup de temps sur un projet et pourquoi ?

J’utilise rarement des jeux grands publics dans le cadre professionnel. Donc si je dois citer des jeux ou des dispositifs ludiques, ce sera forcément des réalisations spécifiques.

3 exemples me viennent en tête :

1/ L’utilisation de la simulation

Il y a quelques années, nous devions remplacer le logiciel de saisie de commandes d’une grande entreprise de VPC nordiste.

Pour ce projet, avoir recours à la simulation a été un réel accélérateur :

utiliser Excel pour maquetter les écrans de la future application et simuler leurs comportements avec quelques macros a largement simplifié l’adhésion des futures utilisatrices qui avaient du mal avec un cahier des charges papier à se représenter le fonctionnement de l’application.

– sur ce même projet quelques mois plus tard, nous devions faire des “tests de charge” c’est-à-dire simuler l’utilisation de la nouvelle application par des centaines d’utilisatrices. Plutôt que de passer par l’acquisition d’un logiciel technique dédié (et coûteux), j’ai eu l’idée d’enregistrer sur un PC un scénario de saisie de commandes puis de le lancer en automatique sur les 30 PC des collègues du plateau. Une belle façon de hacker le système 😉

2/ Le serious game

Quelques années plus tard, j’ai fait mes premiers pas dans le domaine de la formation et j’ai notamment été missionné pour sensibiliser toute l’équipe des comptables au fonctionnement de leur entreprise.

J’ai eu la chance de tomber sur la solution “Orange & Apples” de la société suédoise Celemi : un jeu immersif d’une journée où les participant·es doivent simuler le fonctionnement d’une entreprise de retail avec les conséquences directes de leurs décisions sur le compte de résultat et le bilan.

Comme disait un des participants : “je savais qu’on allait jouer mais je ne savais pas qu’on allait jouer autant”

3/ Le serious game encore et toujours

Et s’il y a un jeu que j’utilise encore aujourd’hui,c’est un jeu de cartes que nous avons créé avec ma collègue Nicole Hardy pour sensibiliser les équipes à la gestion du stress individuelle et collective :
– la pioche contient les événements stressants (ou pas) d’un quotidien professionnel.
– chaque joueur a dans son jeu – en fonction de son rôle – des cartes qui lui permettent de réguler (ou pas) son stress ou celui de ses collègues.
– j’y ai ajouté des cartes joker qui permettent à la personne qui anime de donner des apports théoriques pour comprendre les mécanismes du stress.

Voilà encore une bonne façon de développer sa compréhension du monde par le jeu !

Version distancielle disponible sur https://www.jeuxboss.fr/

4/ Quel est le jeu que tu préfères utiliser pour animer un atelier à distance (en visio) ?

Alors là tu me poses presque une colle.

En effet, en bon créatif que je suis, j’ai la furieuse manie de ne jamais refaire 2 fois la même chose.

Et quel que soit l’atelier que j’anime, même un de mes ateliers “packagés”, j’ai toujours tendance à changer quelque chose, à ajouter un nouvel ingrédient et à faire en sorte que chaque atelier soit une aventure unique.

Allez, peut-être l’un des jeux qu’on retrouve souvent dans mes ateliers à distance, c’est un quiz Kahoot.

J’en utilise souvent pour réactiver l’attention et avec 4 réponses possibles, il y a toujours moyen de glisser une petite blague dans une des options ce qui permet en plus de mettre un peu de fun.

Pour l’anecdote, mon utilisation de Kahoot date de mon retour d’un séjour à New York en 2016. Mes collègues m’avaient invité à leur montrer les photos que j’avais prises.

Kahoot existait depuis 2013 et Quizizz venait d’être créé l’année précédente. Je me suis dit que c’était l’occasion de les tester sur un évènement sans enjeu et j’en ai donc profité pour en faire une expérience apprenante.

Sans surprise, l’entreprise où je travaillais a acquis plusieurs licences Kahoot dans les mois qui ont suivi 😅

Kahoot: https://create.kahoot.it/ Quizizz: https://quizizz.com/

5/ Quel est le jeu qui te plait le plus pour souder une équipe ?

J’ai dans ma besace pas mal de modalités d’intelligence collective qui contribuent à créer une cohésion d’équipe. Selon la maturité du groupe, je vais choisir celles qui s’appuient sur la bienveillance ou l’empathie, celles qui permettent de mieux se connaître ou encore celles qui invitent à révéler sa vulnérabilité.

Si je devais citer 2 modalités plus ludiques que les autres, je dirais :

– pour débuter une rencontre, une de mes modalités préférées est celle que nous avons imaginée avec mon collègue Henri Haltz. Elle est calquée sur une publicité pour la télévision danoise… d’où le nom qu’on lui a donné: le icebreaker danois.
(Pour voir la pub, c’est ici: https://www.youtube.com/watch?v=TjW84K6cLUo)

Les participant·es forment un grand cercle, l’animateur pose des questions (hé oui, on retrouve ici encore des questions 😉) et les personnes concernées avancent d’un pas (charge à l’animateur d’aller recueillir une anecdote auprès de l’un·e ou l’autre)

L’avantage de cette modalité est que les questions peuvent être adaptées au public (par exemple avec des experts en développement personnel, une question comme “Qui a déjà fait l’expérience du désert?” est un “Best of” 😅)

Et nous commençons toujours cet icebreaker par la première question de la pub : “Qui était clown dans sa classe quand il était petit?”, question qui a le mérite de déstresser les personnes qui n’aiment pas ce genre d’exercice.

– et pour conclure une rencontre, j’aime aussi utiliser la modalité que j’appelle “les frères Ripolin” : on scotche une feuille cartonnée dans le dos de chaque participant·e et ses collègues viennent lui écrire un encouragement, un bravo ou un merci en lien (ou pas) avec la rencontre qui a été vécue.

C’est ce qu’Éric Berne appelle un “stroke”, un signe de reconnaissance. Partager des strokes positifs est un extraordinaire moyen de souder une équipe.

Merci de m’avoir invité à répondre à tes questions.

Ce n’est pas toujours simple, mais j’ai eu plaisir à me prêter… au jeu 😉

J’espère que tu auras pris autant plaisir que moi à découvrir les jeux de Stéphane. Tu peux le retrouver ici :
– son profil LinkedIn: https://www.linkedin.com/in/stephane-delbecque-lille/
– son site web: https://www.jeuxboss.fr/


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